Monsieur le Président,
Monsieur le Ministre,
Mes chers-ères collègues,
Les Français sont de plus en plus nombreux à vouloir agir pour les autres, à « faire société » ensemble et partager des valeurs civiques, que se soit dans un cadre organisé : politique, syndical, municipal, religieux, économie sociale et solidaire ; ou sur un mode plus informel, auprès d’une ou plusieurs personnes, en dehors du cadre familial (ex : la solidarité de voisinage).
Riche de ce tissu associatif rassemblant entre 13 et 18 millions de bénévoles engagés, pour les deux tiers d’entre eux, dans les 1,3 millions d’associations répertoriées, notre modèle français de l’engagement citoyen, qui participe pleinement à la construction de notre société, doit cependant faire face à de nombreuses difficultés.
Je pense notamment :
! à la baisse drastique des dotations de l’Etat aux associations, caractérisée par une chute de -10% des crédits sur les deux derniers exercices budgétaires et par une diminution de la part des subventions dans le total des ressources des associations d’environ 15 milliards en 10 ans, passant de 34 % en 2005 à 24,7 % en 2011, et même à 16,8 % en 2014 selon l’INSEE ;
! à la diminution des dotations aux collectivités territoriales ;
! à la réforme des rythmes scolaires, qui a souvent suscitée des polémiques et des difficultés, en particulier dans les communes rurales (ex : en Creuse, il reste aujourd’hui une seule commune qui l’applique) ;
! à la suppression brutale et sans concertation de plus de 250 000 contrats aidés en l’espace de deux ans, contrats qui contribuent à l’emploi associatif : 459 000 contrats aidés en 2016 pour 4,2 milliards d’€ de subventions contre 200 000 en 2018 pour 1,4 milliards d’€ de subventions. Cette réduction a donné un véritable coup d’arrêt à de nombreuses associations, qui pratiquaient souvent une mutualisation de leurs moyens humains et financiers ; tout cela créant un nouveau transfert de tâches sur les bénévoles ;
! à l’absence de véritable statut encadrant cette activité bénévole, basée sur l’engagement volontaire et la gratuité ;
! à la baisse structurelle du nombre de bénévoles en fonction de l’augmentation du nombre d’heures données chaque semaine. 3 millions donnent au moins deux heures par semaine, 1 million donne plus de trois heures ;
! et, enfin, à la suppression de la réserve parlementaire qui apportait environ 60M€ par an aux associations.
Ces différentes mesures viennent directement menacer l’existence de milliers d’associations, priver d’emplois un nombre important de salariés et empêcher les collectivités territoriales d’assurer la continuité du service public de proximité. Elles ont également un impact sur le moral et l’engagement des bénévoles, qui attendent et espèrent une reconnaissance accrue de la part des pouvoirs publics.
Si elle permet de sécuriser juridiquement l’action de nos dirigeants bénévoles et de sensibiliser à la vie associative de nos jeunes collégiens et lycéens, la proposition de loi en faveur de l’engagement associatif, adoptée mercredi dernier par notre assemblée, représente une première étape nécessaire mais ne consolidera pas à elle seule un modèle fragilisé.
Le bénévolat demeure le premier point d’achoppement pour les associations et arrive en tête de leurs préoccupations, devant la situation financière. 40 % des responsables associatifs interrogés dans les enquêtes de Recherches et Solidarités se disent en effet inquiets des difficultés de renouvellement des dirigeants. Cette crise de responsabilités trouve en partie son explication dans la judiciarisation accrue de l’acte bénévole, lorsque la responsabilité pénale, fiscale et sociale des dirigeants est susceptible d’être engagée.
Rappelons que 42% des 1,3 millions associations répertoriées ont pour activité principale le sport ou la culture, soit 545 000. Parmi celles-ci, seules 12 % (soit 70 000) sont des associations employeuses : 36 000 dans le domaine du sport et 34 000 dans le secteur culturel. Pourtant, le modèle le plus efficient me semble être celui combinant professionnalisme et bénévolat.
Par la méthode dite des coûts de remplacement, une récente étude (août 2018) du Centre de Droit et d’Economie du Sport (CDES) de Limoges valorise le poids économique du bénévolat sportif entre 5,22 milliards d’€ (pour une valorisation au SMIC) et 10,10 milliards d’€ (pour une valorisation au salaire moyen de la branche). Sur les mêmes bases, et pour comparaison, le bénévolat peut être valorisé entre 3,60 Milliards d’€ et 8,22 Milliards d’€ dans le secteur culturel.
Alors que la vie associative se professionnalise, des individus aux parcours et aux compétences différentes se côtoient dans l’encadrement des associations sportives. L’équilibre entre ces individus est un garant de la pérennité d’un club et de son développement ; le mouvement sportif ne saurait exister sans toutes ces « petites mains », ces bénévoles « traditionnels » qui s’activent aux côtés des professionnels (ex : les conseillers techniques sportifs).
Face à une montée des exigences de compétences et de performance qui rapprochent l’association sportive, dans sa gestion, d’une entreprise, le public et les licenciés poussent les clubs et leurs bénévoles à s’adapter, à se former afin de gagner en efficacité et en technicité dans la finance, la gestion humaine, la planification des entrainements ou encore l’organisation des déplacements…
Il est de notre responsabilité d’encourager et de faciliter leur engagement.
Enfin, à travers son objectif d’intégration républicaine, je formule le souhait que le futur SNU suscite des vocations d’implication bénévole.